La Pinacothèque de Brera, à Milan, vient d’inaugurer une vaste exposition qui met en dialogue les créations de Giorgio Armani, le légendaire couturier disparu en septembre, avec des chefs-d’œuvre de la peinture ancienne signés Caravage, Bellini et Raphaël. Intitulée « Giorgio Armani : Milano, per amore », elle réunit plus de 120 pièces conçues par le styliste, intégrées au parcours permanent du musée.
Ouverte depuis le 24 septembre, en parallèle de la Fashion Week de Milan, l’exposition a été accompagnée le 28 septembre par un défilé imaginé par Armani dans la cour de la Brera, à deux pas de son élégante demeure de la Via Borgonuovo. Ces deux initiatives avaient été conçues à l’origine pour célébrer le 50e anniversaire de la maison Armani, fondée dans ce quartier où son créateur résidait depuis les années 1980.
« Armani était et demeure le symbole de Brera », souligne Angelo Crespi, directeur de la Pinacothèque, dans un entretien accordé à The Art Newspaper.
Giorgio Armani a suivi de près la conception de l’exposition jusqu’à peu de temps avant sa disparition, ce qui en fait son ultime projet. « Il a pris toutes les décisions liées au parcours », souligne Angelo Crespi.
Certaines tenues dialoguent directement avec les chefs-d’œuvre de la Pinacothèque. Un ensemble de vêtements sombres souligné de touches blanches – dont un tailleur pailleté noir et blanc et une redingote de velours ornée d’une broche florale – fait écho au clair-obscur dramatique du Souper à Emmaüs (1606) du Caravage. Plus loin, des mannequins vêtus de blouses couleur sable et de trench-coats en coton évoquent les femmes musulmanes voilées agenouillées dans la monumentale Prédication de saint Marc à Alexandrie (1504-1507) de Bellini.
Angelo Crespi se souvient qu’au cours d’une visite l’an dernier, Giorgio Armani avait confié être surtout sensible à « l’atmosphère et aux couleurs » des salles. « Il s’est arrêté devant la Lamentation sur le Christ mort de Mantegna et a déclaré : « Je ne veux pas me comparer à ces maîtres » », raconte le directeur.
L’exposition invite les visiteurs à porter un regard renouvelé sur les vêtements et les tableaux présentés. « L’histoire de l’art et la mode dialoguent ici, invitant le public à découvrir des contrastes chromatiques et de matériaux saisissants », souligne le musée. Giorgio Armani avait déjà eu les honneurs d’institutions muséales de son vivant, notamment lors d’une exposition majeure en 2001 au Guggenheim Museum de New York. Pour Gian Luca Bauzano, journaliste « mode » au Corriere della Sera, cet événement fit date : « Pour la première fois, un créateur de mode concevait une grande exposition monographique centrée sur lui-même », rappelle-t-il.
À la Pinacothèque de Brera, l’exposition « Giorgio Armani : Milano, per amore » s’inscrit dans une volonté affirmée d’élargir l’audience du musée au-delà du cercle des amateurs d’art. Depuis le lancement de Grande Brera – le complexe rénové qui réunit la Pinacothèque, le Palazzo Citterio consacré à l’art moderne et La Cène de Léonard de Vinci –, la fréquentation a fortement augmenté. Selon Angelo Crespi, la pinacothèque de Brera et le Palazzo Citterio devraient accueillir à eux seuls 600 000 visiteurs d’ici la fin de l’année, soit une hausse de 20 % par rapport à 2024.
« Giorgio Armani : Milano, per amore », jusqu’au 11 janvier 2026, Pinacothèque de Brera, Via Brera 28, Milan, Italie
