Avec Giorgio Armani disparaît l’un des plus influents créateurs de mode du XXe siècle. Le couturier est décédé le 4 septembre à Milan, à l’âge de 91 ans. Inventeur d’une mode moderne – silhouettes fluides, lignes épurées –, il a habillé les grands de ce monde et bâti un véritable empire du luxe en l’espace de cinq décennies, de la mode au design en passant par une chaîne de restaurants (Armani Caffé), d’hôtels estampillés Armani, des boutiques dans le monde entier… Des lignes Giorgio Armani et Emporio Armani à la Haute Couture (Armani Privé), présentées sur les podiums de Paris et Milan, il a su imposer un style intemporel, reconnaissable au premier coup d’œil, raffiné, aux matières nobles – avec une prédilection pour le velours souple, des gris et bleu emblématiques. Sa ligne de mobilier Armani Casa fait écho à sa vision, une esthétique discrète et élégante, incarnée par le styliste, invariablement vêtu avec sobriété et secret dans un milieu volontiers porté sur l’ostentation.
Né le 11 juillet 1934 à Plaisance, en Émilie-Romagne, en pleine Italie fasciste, ce self-made-man a fait ses premiers pas aux côtés de Nino Cerruti dans les années 1960, après avoir entamé des études de médecine et s’être lancé comme assistant-photographe. Il a travaillé un temps comme étalagiste au sein du grand magasin La Rinascente à Milan. Devenu styliste, il se consacre à la coupe et au costume masculin, avant de voler de ses propres ailes à partir de 1974 en fondant sa propre marque. Lorsqu’en 1980 Richard Gere porte des costumes Giorgio Armani dans le film American Gigolo, le succès est lancé. Le couturier ne cessera par la suite d’habiller le Tout-Hollywood. Créateur prolifique, Giorgio Armani était en outre un businessman habile, doté d'un sens avisé du marketing. Farouchement indépendant, il est parvenu à durer et à conserver les rênes de son empire durant un demi-siècle. Après la disparition de Sergio Galeotti, son partenaire et cofondateur de la griffe, emporté par le sida en 1985, Giorgio Armani, connu pour être un bourreau de travail, veillera personnellement sur les comptes de sa société tout en conservant la main sur la création.
En 1982, il fait la couverture de Time. Andy Warhol réalise son portrait. Martin Scorcese l’immortalise dans son documentaire Made in Milan. Grand amateur d’art et d’architecture, proche de nombreux artistes, Giorgio Armani était aussi collectionneur. « Une œuvre qui incarne l’harmonie, l’inventivité et une forme de légèreté philosophique », disait-il d’un dessin de Matisse lui appartenant. Admirateur des natures mortes de Giorgio Morandi, il collectionnait meubles et objets de style Art déco – un goût pour une élégance fonctionnelle, sobre et géométrique que l’on retrouve dans sa mode. Passionné de décoration intérieure et d’architecture, il avait notamment collaboré avec Tadao Ando pour l’Armani/Teatro à Milan.
Le Guggenheim Museum à New York a consacré à l’œuvre du couturier une importante rétrospective (« Giorgio Armani », 20 octobre 2000 – 17 janvier 2001). En 2015, pour célébrer quarante ans de création, Giorgio Armani a inauguré Armani/Silos à Milan, un musée installé dans un ancien silo à grains. Affaibli par la maladie, le couturier continuait de superviser chaque collection. N’ayant pu, pour la première fois, assister à ses défilés en 2025, il préparait le 50e anniversaire de sa maison. À Venise, il a inauguré la plateforme numérique Armani/Archivio, afin de transmettre son héritage. Le groupe Armani a salué « la disparition de son créateur, fondateur et force infatigable ». « Je ne fais pas de l’art ; je fais des habits. Mais j’aimerais qu’on se souvienne d’un style, d’une certaine façon de vivre », avait déclaré un jour l'iconique créateur de mode italien.
