Si les grandes galeries peuvent se féliciter de bons résultats, elles ne sont pas les seules. Les galeries émergentes d’Art Basel Paris ont elles aussi tiré leur épingle du jeu. Leurs prix sont plus accessibles, et leurs motivations à participer à la foire diffèrent. En échangeant avec plusieurs galeristes du secteur Emergence, il apparaît qu’ils ont gagné en visibilité, noué de nouveaux contacts et réalisé des ventes prometteuses.
Installée sur les balcons du Grand Palais, cette section se caractérise par ses stands ouverts, offrant des perspectives dégagées sur l’ensemble de la foire. Mais une question demeure: les visiteurs montent-ils vraiment à l’étage pour les découvrir ?
Si les ventes à plusieurs millions d’euros réalisées dès les deux premiers jours ont retenu l’attention et apaisé certaines inquiétudes, les galeries de plus petite taille doivent elles aussi vendre pour confirmer la reprise du marché. Jusqu’à présent, Sans Titre (Paris), Pauline Pavec et Magnin-A ont toutes déclaré avoir enregistré de bons résultats. Athr Gallery, présente à Riyad, Djeddah et AlUla, a annoncé des ventes comprises entre 10 000 et 62 000 riyals saoudiens (soit environ 2 500 à 15 000 euros). Dvir Gallery a vendu des œuvres dans une fourchette de 1 800 à 10 000 euros, tandis que Jousse Entreprise a cédé six pièces, entre 4 800 et 26 000 euros.
Marie-Christine Molitor, fondatrice de la Galerie Molitor, avait jusqu’ici travaillé pour d’autres galeries sur la foire. C’est la première fois qu’elle y expose sous son propre nom, présentant Dora Budor dans le secteur Emergence. « J’ai déjà travaillé ici, mais c’est ma première expérience avec ma propre galerie, explique-t-elle. Nous avons eu de nombreux contacts et réalisé plusieurs ventes. Il y a eu du passage à l’étage, même si ce n’était pas aussi fréquenté qu’en bas. »
C’est d’ailleurs le constat général partagé par les galeries du secteur Emergence lors de l’Avant-première, mardi 21 octobre : une atmosphère plus calme, propice aux échanges directs avec les personnes triées sur le volet, et des ventes ciblées – mais peu de nouveaux collectionneurs.
Suela Cennet, Parisienne d’origine, a fondé The Pill à Istanbul il y a dix ans, avant d’ouvrir un espace à Paris l’an dernier, à l’occasion de sa première participation à la foire, dans la section Premise. De retour cette année, elle confie avoir vendu l’ensemble des œuvres de l’artiste en vogue Nefeli Papadimouli dès la première heure de l’Avant-première.
« Avec moins de visiteurs, l’atmosphère était particulièrement propice aux échanges avec les collectionneurs. Nous avons pu prendre le temps de discuter en profondeur des œuvres avec les acheteurs potentiels, ce qui a facilité d’importantes acquisitions », explique-t-elle. « Je suis ravie de revenir ici, et d’incarner pleinement cette double identité entre Paris et Istanbul », ajoute-t-elle.
La galerie londonienne Ginny on Frederick, qui présente Arash Nassiri, venait de connaître une Frieze Week particulièrement réussie à Londres. Son stand primé mettait en avant à Londres le travail d’Alex Margo Arden, lauréate du Nicoletta Fiorucci Foundation Prize, dont une œuvre a été acquise par le Frieze Acquisitions Fund de l’Arts Council Collection. C’est portée par cet élan que la galerie participait pour la première fois à Art Basel Paris. « Nous avons vite retrouvé notre rythme pour profiter pleinement de Paris. Nous avons exposé cette année dans la section Statements à Bâle, avec un excellent accueil, et nous sommes ravis de la manière dont Paris nous a reçus, confie Freddie Powell, fondateur de la galerie. Art Basel Paris offre à une jeune galerie un rayonnement plus large – exactement ce que nous recherchons : faire découvrir notre travail à un public plus vaste et multiplier les rencontres. Je crois que nous y sommes parvenus. »
Certains observateurs ont noté que l’Avant-Première semblait avoir, dans une certaine mesure, éclipsé Paris Internationale, qui s’ouvre traditionnellement le mardi soir et concentre habituellement l’attention sur l’art émergent.
Si les ventes se sont révélées globalement solides, les galeries du secteur Emergence ont, quant à elles, des motivations multiples à leur participation. Piero Bisello, cofondateur de Gauli Zitter, explique qu’avec un prix moyen de 4 500 euros par œuvre, il leur faudrait vendre la totalité du stand pour rentrer dans leurs frais. Il souligne cependant que la visibilité de la foire et les nombreux contacts institutionnels et curatoriaux établis justifient pleinement leur présence. Toutes les galeries interrogées dans le secteur partagent ce constat, affirmant avoir rencontré un public exceptionnellement varié et stimulant tout au long de la foire.
Le format du secteur Emergence repose sur des présentations monographiques, chaque stand étant consacré à un seul artiste – parfois présent sur place. Ash Love, qui participait pour la première fois à Art Basel Paris, accompagnait la galerie parisienne Exo Exo (l’une des trois galeries françaises de la section) et confiait que, pour un artiste français, exposer au Grand Palais revêtait une signification toute particulière. Iel ajoutait avoir rencontré et renoué avec de nombreux contacts institutionnels durant la foire.
Dans l’ensemble, les galeries émergentes s’accordent à dire que, même si tous les collectionneurs ne sont pas montés au premier étage, les ventes se sont révélées solides et conformes aux attentes du marché, et que la visibilité et les opportunités de réseau offertes justifiaient pleinement leur participation.
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Art Basel Paris, 24 au 26 octobre 2025, Grand Palais, 17, avenue du Général-Eisenhower, 75008 Paris.
