Est-ce le temps maussade de ces derniers jours qui altèrent l’enthousiasme de certains marchands, ou la réalité d’un marché rattrapé par le climat anxiogène ambiant ? « Si les pièces d’une qualité incontestable trouvent preneur dès le premier jour, c’est plus difficile pour les objets de qualité médiane. Cela coince notamment au-delà de 25 000-30 000 euros », résume Julien Flak. Dans ce contexte un brin frileux, le marchand confesse cependant avoir effectué une dizaine de ventes depuis l’ouverture du salon, dont une splendide effigie Malagan de Nouvelle-Irlande du début du XXe siècle ayant appartenu au peintre surréaliste Roberto Matta. Le prix demandé pour cette pièce océanienne majeure, dont les enchevêtrements complexes ne sont pas sans rappeler ceux des tableaux du maître chilien, excédait pourtant les 50 000 euros.

Chez Abla et Alain Lecomte, ce fétiche Songye et cette maternité Phemba n’ont pas encore trouvé d’acquéreur. Photo B.G.-S.
On retrouve le même constat chez Yann Ferrandin, dont deux des pièces les plus prestigieuses se sont envolées dès le premier jour du Parcours pour un prix à la hauteur de leur caractère exceptionnel : une sculpture maorie du XIXe siècle au pedigree parfait, et une sculpture nkisi nkonde de la culture Kongo d’une rare intensité. A contrario, un superbe masque Fang présenté lors de l’Exposition internationale de 1931, à la Porte Dorée, et dont le prix affiché est de 120 000 euros, attendait toujours son acheteur…

Effigie Malagan (Nouvelle Irlande) ayant appartenu à Robert Matta, galerie Flak. Photo B.G.-S.
Une pointe de déception transparaît chez certains marchands, confrontés à un marché marqué par une forme d’attentisme. Alain Lecomte affichait ainsi sa surprise de ne pas avoir encore vendu sa superbe maternité Kongo Phemba (autour de 40 000 euros) ou ce « fétiche » Songye (autour de 28 000 euros), qui comptent habituellement parmi les pièces iconiques recherchées par les collectionneurs. Même étonnement de la part du marchand anversois Bruno Claessens, dont le bel ensemble de reliquaires Kota n’a manifestement pas encore su séduire le moindre acquéreur…

Figure de proue d’un kayak, Galerie Vallois. Photo B.G.-S.
Cette 24ᵉ édition révèle un intérêt grandissant du public pour l’art des peuples du Grand Nord, dont les prix n’atteignent pas encore ceux des arts africain et océanien. Anthony Meyer se félicite ainsi d’avoir vendu un ornement de chasse en ivoire aléoute épousant la silhouette stylisée d’une loutre de mer couchée sur le dos. Cette magnifique pièce aux vertus magico-religieuses vient de changer de mains pour 12 500 euros. Consacrant tout son espace à l’art des peuples Inuits et Samis, la Galerie Vallois expose, elle aussi, un remarquable ensemble d’amulettes et de pièces ethnographiques, parmi lesquelles une figure de proue de kayak sculptée dans l’ivoire, dont le langage oscille entre réalisme et abstraction. Sculpturale à souhait, cette pièce a trouvé preneur dès les premiers jours du Parcours autour de 3 500 euros…
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Parcours des mondes, jusqu’au dimanche 14 septembre 2025, quartier des Beaux-Arts et de Saint-Germain-des-Prés, Paris, www.parcours-des-mondes.com
