Publié hier, le rapport 2025, centré sur le genre, l'âge et l'attitude face au risque, révèle que les femmes ne se contentent pas de dépenser davantage pour les œuvres d'art : elles se montrent aussi plus enclines que les hommes à acquérir des œuvres d'artistes encore peu connus.
Ce document de 200 pages s'appuie sur une enquête réalisée à la mi-2025 auprès de 3 100 personnes fortunées (High Net Worth Individuals - HNWIs) actives sur le marché de l'art dans dix pays. L'objectif est clair : identifier qui achète quoi, où, auprès de qui et à quel prix, afin de mieux cerner les grandes tendances du marché à venir. Une part importante du marché actuel de l'art « blue chip » repose encore sur les goûts des collectionneurs issus des générations du Baby-Boom et de la Silent Generation, majoritairement des hommes. Mais l'analyse des préférences et des comportements des acheteurs des générations Millenial et Gen Z permet désormais aux maisons de ventes, galeries et foires d'anticiper les désirs de la nouvelle génération de collectionneurs.
Les femmes y occupent une place de plus en plus décisive : selon le rapport, elles détenaient fin 2024 plus d'un tiers de la richesse mondiale - une proportion en forte progression. D'après le UBS Gender-Lens Investment Report 2025, elles gèrent à elles seules environ 32 000 milliards de dollars de dépenses mondiales, et devraient contrôler 75% des dépenses discrétionnaires à l'échelle mondiale d'ici cinq ans.
C'est pourquoi l'économiste Clare McAndrew, autrice du rapport, a tenu à ce que l'échantillon 2025 soit réparti à parts égales entre hommes et femmes, afin d'analyser plus finement les différences de genre dans les pratiques de collection. L'étude couvre également un large éventail d'âges pour anticiper l'évolution des comportements d’achat dans les prochaines générations – 74 % des personnes interrogées appartiennent aux générations Millennial et Gen Z.
Clare McAndrew précise que ces rapports sur les collectionneurs ne constituent pas « une prise de température du marché », à la différence du rapport annuel Art Basel and UBS Art Market Report, qu’elle rédige également et qui paraît chaque printemps. Ils s’appuient plutôt sur un échantillon élargi de personnes fortunées, invitées à auto-évaluer leurs goûts, leurs motivations et leurs habitudes de dépense.
Bien que le contexte global reste marqué par une incertitude géopolitique et économique persistante – accentuée par la hausse des droits de douane et les entraves croissantes aux échanges internationaux comme à la libre circulation –, les plus importants patrimoines continuent d’investir activement dans l’art, les antiquités et les objets de collection, selon le rapport. Les High Net Worth Individuals (HNWIs) interrogés ont consacré en moyenne 20 % de leur richesse à leurs collections d’art (contre 15 % en 2024), tandis que les Ultra High Net Worth Individuals (UHNWIs), dont les actifs dépassent 50 millions de dollars, y ont alloué en moyenne 28%.
En moyenne, les répondants ont dépensé 438 990 dollars et acquis environ 14 œuvres chacun. Les Boomers, bien que constituant le groupe le plus restreint, demeurent les plus gros acheteurs, avec près de 993 000 dollars dépensés, suivis des Millennials à 523 000 dollars.
Fait notable: les collectionneurs de la Gen Z consacrent proportionnellement une part bien plus importante de leur fortune à l’art (26%). Parmi eux, 90% de ceux ayant hérité d’œuvres d’art déclarent vouloir les conserver, tandis que 80 % de l’ensemble des répondants, toutes générations confondues, prévoient de transmettre leurs collections à leurs enfants.
Le rapport s’est également intéressé à l’évolution des goûts et des priorités de collection selon les générations. Tandis que les Boomers privilégient encore largement la peinture, les Millennials et la Gen Z affichent des goûts plus diversifiés. Les Millennials sont ceux qui investissent le plus dans les arts décoratifs, le design et la joaillerie. Et, contrairement à l’idée reçue selon laquelle la Gen Z serait davantage tournée vers les expériences que vers la possession matérielle, cette génération se révèle la plus dépensière dans de nombreux autres domaines : sacs à main (au même niveau que les Boomers), voitures de collection, bateaux, jets privés, et surtout baskets, pour lesquelles elle dépense en moyenne cinq fois plus que les autres générations — soit environ 19 440 dollars pour des chaussures de seconde main.
Malgré l’effondrement du marché des NFT, l’art numérique connaît un regain d’intérêt inattendu: 23% des personnes fortunées interrogées déclarent envisager d’en acheter, contre 19 % lors de la précédente enquête, et cette proportion grimpe à 26 % chez les collectionneurs de la Gen Z.
Dans l’ensemble toutefois, tous âges et genres confondus, la peinture demeure le médium le plus convoité : 48 % des HNWIs prévoient d’en acquérir une au cours de l’année à venir, suivie par la sculpture (37 %). Les membres de la Gen Z se distinguent une fois encore par leur appétit d’achat, juste derrière les Boomers, avec 40 % d’entre eux souhaitant acquérir une sculpture – une proportion supérieure à celle des Gen X et des Millennials.
Les femmes, quant à elles, manifestent un intérêt plus prononcé que les hommes pour la plupart des catégories d’œuvres, à l’exception de la peinture, de la sculpture et des œuvres sur papier. Elles se distinguent notamment par leur attrait pour la photographie, les installations, l’art textile et l’art numérique.
