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Reportage

Nina Childress choisit « Citroën Boys » d'Alain Jacquet

La jeune académicienne, dont les toiles aux pigments iridescents sont visibles chez Art : Concept, à Paris, révèle son admiration pour la sérigraphie de l’artiste français. Elle évoque ses liens d’amitié avec lui, ainsi que sa fascination pour l’esprit des années 1960 et 1970.

Propos recueillis par Marc Donnadieu
15 octobre 2025
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Nina Childress. 

License libre

Nina Childress.

License libre

L'objet de...

Chaque mois, dans le mensuel The Art Newspaper édition française, des personnalités nous présentent un objet qui leur est cher et nous dévoilent leur relation intime et particulière à cette œuvre d'art.

Lorsque mes parents ont déménagé à New York, ils sont devenus très vite proches des artistes Christo et Jeanne-Claude. Au square, ma mère parlait en français à mon frère Jeff et moi, et Jeanne-Claude parlait aussi en français à son fils Cyril, lequel doit avoir mon âge (Nina Childress est née en 1961 à Pasadena (Californie), aux États-Unis). Un lien d’amitié s’est donc créé assez rapidement. Mon père [William Stephen Childress] étant un mathématicien spécialiste de mécanique des fluides, Christo a sollicité son aide sur les calculs de certains de ses projets.

Mes parents ont également rencontré Alain Jacquet à New York ; celui-ci vivait alors entre la France et les États-Unis. De retour en France, en 1966, avec ses deux enfants, ma mère a continué de voir Alain Jacquet de temps en temps à Paris. Lors d’un voyage de mon père en France, au début de l’année 1968, nous sommes allés lui rendre visite tous les quatre dans son atelier. Il faisait alors des œuvres en braille. À cette occasion, il a demandé à mon père d’écrire sur son travail en ce qui concerne le fait de retirer des informations et sur ce qui a lieu d’un point de vue mathématique (pour le catalogue de l’exposition d’Alain Jacquet à la galerie Yvon Lambert publié en mai 1968).

Une œuvre fascinante

L’œuvre Citroën Boys (1966) a été offerte par Alain Jacquet à ma mère à peu près à ce moment-là. Cette sérigraphie est donc devenue pour moi emblématique de cette période de la fin des années 1960 et du début des années 1970 dont j’adorais l’esthétique, le côté pop. Ma mère travaillant dans la publicité, je passais mon temps à feuilleter des magazines. J’aimais surtout les publicités, le graphisme, les logos. Petite, j’étais fascinée par tout ce qui peut rendre quelqu’un célèbre, surtout dans le domaine de la variété et de la télévision. Je considérais la publicité comme un tremplin pour être connu. Mon rêve était donc de tourner dans une publicité télévisée et de passer en permanence à l’écran, qui était selon moi le seul canal de diffusion pour accéder à la gloire ! J’ai uniquement posé pour une photographie qu’a réalisée ma mère pour les éditions Robert Laffont afin de vendre des jeux éducatifs. J’y ai tenu le rôle de la petite fille de la famille...

Lorsque j’étais malade, je pouvais regarder la télévision toute la journée, même quand il n’y avait rien, ou juste les interludes, le petit train, l’horloge ou la mire... Par la suite, au moment où j’ai vraiment commencé la peinture, j’ai immédiatement représenté les héros de la série télévisée américaine Dallas ! Et la première fois que l’on m’a parlé du magnétoscope, je me suis écrié : « Quoi ? On peut prendre la télévision ? On peut la garder ? On peut l’arrêter ? » Dès lors, tout ce que j’aimais, je l’enregistrais !

Mais, au départ, je passais des heures devant Citroën Boys d’Alain Jacquet. J’ai toujours vu cette sérigraphie accrochée au mur. Elle possède une magie qui me fascine : en s’approchant, l’image disparaît, en se reculant, elle apparaît [elle représente, en haut, le capot arrière d’une Citroën et, en bas, deux garçons allongés devant, sur le sol, les bras repliés derrière la tête]. Ce rapport d’Alain Jacquet à la photographie, à l’image imprimée, à la décomposition des couleurs, leur addition ou leur soustraction, la superposition de couches d’impression, et l’agrandissement des trames et des points, c’est tout ce que j’ai essayé de faire ensuite dans mon travail de peinture. Je me suis même aperçue que j’avais réalisé deux tableaux directement influencés par Citroën Boys : la Mercedes floue de Blurriness (Mercedes) datant de 2000, sur laquelle, en bas, il y a la trace blanche des deux boys ; et le très gros plan d’un dessin au fusain de Trame noir et blanc de 2004. Finalement, je voulais tant avoir Citroën Boys chez moi que je l’ai échangé contre Trame noir et blanc avec ma mère. À son décès, j’en ai définitivement hérité.

Alain Jacquet, Citroën Boys, 1966, sérigraphie.

Photo D.R.

Le mythe américain

Au milieu des années 1980, j’étais obsédée par le psychédélisme. Lorsque j’ai découvert l’art cinétique et l’op art, cela m’a stupéfiée. J’allais tout le temps chez [la galeriste] Denise René [à Paris]. Je peignais ensuite des hommages à [Carlos] Cruz-Diez ou à [Jesús Rafael] Soto, des [Victor] Vasarely fluorescents et des scènes du film La Prisonnière [1968] d’Henri-Georges Clouzot. Mais il y a toujours dans mon travail cette nostalgie des États-Unis, cette ambivalence à leur encontre. J’ai construit ma petite enfance américaine comme une sorte de mythe. Mes tableaux sur [l’actrice] Farrah Fawcett s’intitulent ainsi California Sweetheart ! Et je viens de terminer pour mon exposition à Paris, « Casting », des portraits de Stevie Nicks (chanteuse et auteure-compositrice états-unienne, en particulier de certains tubes du groupe britannique Fleetwood Mac). Pour autant, ce que je fais est trop compliqué pour les Américains. Ma galeriste new-yorkaise [Nathalie Karg] était même obligée de me présenter comme une artiste « conceptuelle » ! Alors qu’à Paris, en pleine période « conceptuelle », j’affirmais à tout prix une approche « formelle », le fait de peindre des choses « en forme de ».

Je suis une artiste de l’image, de la couleur, donc de l’effet optique. J’expérimente la manière dont certaines couleurs, employées de certaines façons, produisent des effets sur la toile. Je fais de la peinture « à effet » ! La grande problématique qui m’intéresse, c’est l’espace dans le tableau après la naissance de la photographie, le rapport entre la forme et le fond, l’avant et l’arrière, le mouvement du corps et du regard du spectateur, sa perception de la surface et de la matière de la peinture... Je réfléchis longtemps en amont à comment je vais peindre, dans quel ordre, avec quel type de peinture. L’aspect programmatif est très important dans mon travail. En fait, c’est très proche de la cuisine, il y a des étapes à respecter. C’est ce que j’apprends à mes étudiants : faire de la peinture, c’est comme faire des crêpes ! La maîtrise de la pâte à crêpes est une question de gestion entre le liquide, le sec, le gras et la température de la poêle au moment où l’on verse la pâte. En peinture, c’est la même chose : il faut savoir où l’on en est par rapport au liquide et comment bien l’étaler sans produire de grumeaux. Tout est affaire de dilution !

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« Nina Childress. Casting », du 16 octobre au 22 novembre 2025, Art : Concept, 4, passage Sainte-Avoye, 75003 Paris, galerieartconcept.com

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