Abonnements
Rechercher
ePaper
Newsletter
Profile
Abonnements
ePaper
Newsletter
L'actualité des galeries
L'éditorial de la semaine
Expositions
Marché de l'art
Musées et institutions
Politique culturelle
Livres
LE MENSUEL
L'actualité des galeries
L'éditorial de la semaine
Expositions
Marché de l'art
Musées et institutions
Politique culturelle
Livres
LE MENSUEL
Rechercher
L'actualité des galeries
Actualité

Sirène, ville en feu et crâne de sanglier

Patrick Javault
14 novembre 2025
Partagez
Vue de l’exposition « Albert Oehlen : Endless Summer » chez Gagosian, à Paris. © Albert Oehlen. Photo Thomas Lannes. Courtesy Gagosian

Vue de l’exposition « Albert Oehlen : Endless Summer » chez Gagosian, à Paris. © Albert Oehlen. Photo Thomas Lannes. Courtesy Gagosian

L'actualité des galeries

Un choix d'expositions proposées dans les galeries par le critique d'art Patrick Javault

Albert Oehlen : Endless Summer

Depuis trente-cinq ans, Albert Oehlen éprouve une fascination dévorante pour un tableau minuscule de John D. Graham qu’il ne connaît que par reproduction. C’est un tableau peu coloré qui ressemble à une esquisse et qui, dans un espace indifférencié, réunit la tête énorme d’un homme chauve aux moustaches en guidon de vélo (double de l’artiste) et une sirène d’une échelle plus réduite. À ces deux figures s’ajoutent une ronde de soleils léonins, les mots « spaventoso sole » (« coucher de soleil effroyable » en italien) et des mots en cyrillique. C’est une œuvre cryptée mais Albert Oehlen déclare n’avoir aucun goût pour la peinture à message. Après s’être servi à de nombreuses reprises du tableau de Graham comme source, il n’y avait plus songé pendant dix ans avant de lui consacrer une exposition entière chez Gagosian à Los Angeles en 2021. Il pensait alors en avoir fini avec lui, mais il y revient maintenant avec une quinzaine de tableaux (essentiellement de 2024) répartis à Paris entre les galeries Max Hetzler et Gagosian. À côté de ses devanciers qui ont interprété les grands maîtres ou qui se sont dit hantés par une image, Oehlen, en replongeant dans Graham, bouleverse les clichés sur l’œuvre tardive des peintres.

Alors qu’il avait en 2021 privilégié la figure masculine, c’est la sirène qui retient cette fois son attention. La plaçant chaque fois au centre, chevelure ondoyante noire sur fond azuré, traits très simplifiés, Albert Oehlen semble refaire le même tableau en y apportant des variations : coupé en deux et peint de deux manières, coupé en deux avec inversion des deux parties, rehaussé de bandes colorées en fond, entre Kenneth Noland et serviette de bain ; barbouillé façon palette laissant apparaître une image, peint d’une couleur fluide qui emporte le motif dans les flots. L’ironie qu’il y a à délirer à partir de la sirène naïve de Graham n’échappera à personne. « Endless Summer », c’est le titre d’un album culte de Fennesz, qui mêle expérimentation électro et accords pop, mais c’est plus au jazz que l’on pense. Spaventoso sole est à Oehlen ce que My Favorite Things est à Coltrane.

Du 20 octobre au 20 décembre 2025, Gagosian, 4 rue de Ponthieu, 75008 Paris ;Galerie Max Hetzler, 46 & 57 rue du Temple, 75004 Paris

Vue de l’exposition « Kai Althoff » à la Tramps Gallery, Paris. Courtesy Kai Althoff et Tramps Gallery. Photo Nicolas Brasseur

Kai Althoff

Tramps, galerie new-yorkaise, inaugure son espace parisien avec une exposition de Kai Althoff, la première en solo en France pour cet artiste. Reconnu avant tout comme peintre, Althoff touche aussi à la vidéo et à la musique, et s’abstient de tout commentaire sur ses œuvres. Son exposition dans ce local étroit est la transposition de celle qu’il avait présentée l’été dernier dans un espace large et lumineux sur l’île de Filicudi [en Italie]. Elle réunit trois tableaux et deux grands dessins, et avec eux un ensemble d’objets, et d’accessoires, qui élargissent la perspective tout en apportant une forme de perturbation. Avec un mixte de planification et d’improvisation, l’artiste a pris en charge la totalité de l’aménagement, depuis le rideau en maille ajourée sur la porte d’accès vitrée jusqu’à un dispositif d’exposition central, en passant par une vasque et une niche en eternit signées Willy Guhl qui lui appartiennent.

Les toiles des tableaux sont tendues sur des châssis irréguliers qui leur donnent un aspect étiré. Pas de thématique commune entre ces trois œuvres : la vision heureuse d’un foyer où un changement d’ampoule ressemble à un acte de magie, celle apocalyptique d’une ville en feu et d’une population fuyant sur des barques, et cette autre joyeusement colorée d’une scène de rue. On les croirait venues d’un fonds ancien.

Le dispositif d’exposition placé au centre de la pièce est composé de 11 panneaux couverts de stuc, sur cadre de fer forgé, et qui portent toutes sortes de photographies : vues d’atelier, photos de tableaux, portraits de l’artiste, portraits de groupe. Cela rappelle un matériel d’exposition pour salle de classe d’autrefois sur lequel on présenterait un dossier sur l’artiste. Kai Althoff fait entrer un peu d’air de l’atelier et d’ailleurs avec une forme d’ironie légère dans la formulation d’un exercice depuis longtemps validé par l’institution artistique. Cette installation enrichit l’expérience de l’exposition sur un mode désacralisant.

Du 10 septembre au 7 décembre 2025, Tramps Gallery, 33, rue d’Alexandrie, 75002 Paris

Vue de l’exposition « Manuela Marques : Vortex » à la Galerie Anne Barrault. Courtesy Galerie Anne Barrault. Photo Aurélien Mole

Manuela Marques : Vortex

Entre 2017 et 2021, Manuela Marques a séjourné à plusieurs reprises dans une île de l’Archipel des Açores, poursuivant son étude des phénomènes naturels. Le fruit de ces résidences a fait l’objet il y a trois ans d’une triple exposition à Lisbonne, au Havre et à Kerguéhennec [en Bretagne]. En 2023, elle avait déjà montré un choix d’œuvres chez Anne Barrault sous le titre « Répliques » ; elle en offre un nouveau avec « Vortex », très différent dans l’accrochage, comme une autre écriture. À droite en entrant, figure la photo d’un homme vu d’assez près qui fixe pourtant l’objectif comme s’il se trouvait importuné. Sur le mur qui lui fait face, on voit deux mains masculines qui, à contre-jour, s’élèvent vers le ciel, en un geste qui pourrait être de célébration. Entre ces deux photos isolées, Manuela Marques a constitué un mur d’images de dimensions variées qui peuvent se lire comme un carnet de notes, ou les épisodes d’un récit. Les choix de cadrage, l’alternance du point de vue d’un sujet et du point de vue neutre, le choix de donner par le format plus d’importance à une statuette sous un globe de verre qu’à une vue aérienne, ou de photographier le bleu sombre de l’océan comme une matière et une texture ; la présence d’une tête de femme disparaissant sous sa chevelure ou de deux mains qui portent vers nous une pierre volcanique ; tous ces éléments suggèrent une expérience forte, presque initiatique.

Dans la deuxième salle, s’offre un autre jeu d’échelle et de formes avec, se faisant face, un diptyque de vues de nuages renversé à la verticale, et quatre grandes photos d’une tonalité brune, presque abstraites et que l’on peine à identifier. Il s’agit d’archives du centre de surveillance sismique de Ponta Delgada, des papiers noirs de fumée conservant la trace d’une secousse tellurique majeure.

Dans la petite pièce du fond passe Vortex, une boucle de quelques secondes qui fait du passage d’un tourbillon de fumée un mouvement perpétuel.

Du 6 novembre 2025 au 10 janvier 2026, Galerie Anne Barrault, 51 rue des Archives, 75003 Paris

Vue de l’exposition « VOID : L’image du souvenir » à la Galerie Papillon. Courtesy de la Galerie Papillon. Photo Grégory Copitet

VOID : L’image du souvenir

VOID (Arnaud Eeckhout et Mauro Vitturini) a depuis une dizaine d’années fait du son et de ses transcriptions son médium. Cette nouvelle exposition marque un tournant vers l’image et, pour la première fois, vers la peinture. Deux pièces anciennes montrées en introduction permettent au duo de se présenter et d’éclairer cette évolution. Il s’agit de deux grands dessins qui, sur du noir de fumée, retranscrivent, au moyen d’un phonautographe, les ondes sonores d’enregistrements de deux souvenirs personnels que des visiteurs leur ont confié dans le cadre d’un projet. Nouvelle version d’une pièce ancienne, un crâne de sanglier sert d’aiguille à un disque d’étain qui tourne sur une souche d’arbre et fait entendre un grincement régulier.

Trois types de pièces se partagent l’espace principal : des œuvres sur papiers en noir et blanc, des miniatures peintes et des retables aux volets de cuivre. Les œuvres sur papier sont des photos floues, photos de famille qui ont un caractère générique, et des images d’incendies en triptyques. Sur la surface des images est inscrite la transcription sonore de récits imaginés à partir d’elles par l’IA.

Les miniatures peintes, imitant des techniques anciennes, sont présentées en deux séries. L’une regroupe cinq images d’événements dramatiques de ces trente dernières années, recadrées de manière à ne montrer que des détails plus ou moins éloquents. La deuxième série réunit la poignée de main entre Yasser Arafat et Yitzhak Rabin, le poing levé de Nelson Mandela le jour de sa libération, le poing levé de Donald Trump après l’attentat contre lui. Ce dernier regroupement interroge d’autant que le poing de Trump est augmenté d’un gant noir qui rappelle le geste des athlètes noirs en 1968 à Mexico. Trouble de mémoire ou falsification ?

Avec les retables, le parti pris de lire le monde d’aujourd’hui à l’aune de pratiques et de visions anciennes est encore plus marqué. L’un d’eux montre un glacier sous un ciel sombre, un autre est le relief en cuivre d’une colonne de fumée. Aux yeux des climatosceptiques, les réalistes qui s’émeuvent de la fonte d’un glacier doivent ressembler à des croyants.

Du 6 novembre 2025 au 17 janvier 2026, Galerie Papillon, 13 rue Chapon, 75003 Paris

L'actualité des galeriesAlbert OehlenGagosianGalerie Max HetzlerKai Althoff Galerie TrampsManuela MarquesGalerie Anne BarraultVOIDGalerie Papillon
Partagez
Abonnez-vous à la Newsletter
Informations
À propos du groupe The Art Newspaper
Contacts
Politique de confidentialité
Publications affiliées
Cookies
Publicité
Suivez-nous
Facebook
Instagram
Twitter
LinkedIn
Ce contenu est soumis à droit d'auteurs et copyrights