Abonnements
Rechercher
ePaper
Newsletter
Profile
Abonnements
ePaper
Newsletter
L'actualité des galeries
L'éditorial de la semaine
Expositions
Marché de l'art
Musées et institutions
Politique culturelle
Livres
LE MENSUEL
L'actualité des galeries
L'éditorial de la semaine
Expositions
Marché de l'art
Musées et institutions
Politique culturelle
Livres
LE MENSUEL
Rechercher
Expositions
Actualité

Jean-Michel Othoniel revisite la carte du tendre à Avignon

L’artiste déploie pas moins de 260 œuvres cet été dans dix lieux de la cité des papes en suivant le fil de l’amour...ou de ses fantômes. Visite de cette constellation en sa compagnie.

Alexandre Crochet
24 août 2025
Partagez
L'Astrolabe de Jean-Michel Othoniel devant le Palais des papes à Avignon. Photo A.C.

L'Astrolabe de Jean-Michel Othoniel devant le Palais des papes à Avignon. Photo A.C.

Si le rapport au sacré que l’on trouve dans le travail de Jean-Michel Othoniel fait naturellement écho à l’histoire si religieuse d’Avignon, c’est du côté de l’amour que l’artiste a préféré se tourner. Les sonnets de Pétrarque lui ont servi de fil conducteur. « Avignon est pour moi davantage une ville de l’amour qu’une ville du religieux », confie-t-il. C’est ici que le poète est tombé amoureux de Laure, passion déçue dont sont nées les fameuses Canzoniere, en 1374. Dans la chapelle Sainte-Claire, devant laquelle le poète est tombé amoureux, l’artiste a disposé un collier rouge en forme de cœur. « Hommage au patrimoine, l’exposition invite à une chasse aux trésors dans une ville qui est elle-même un musée », souligne l’artiste.

Cœur de Jean-Michel Othoniel à la chapelle Sainte-Claire. © Mairie d'Avignon - CAubry-GQuittard

C’est un terrain de jeu hors normes qu’il a trouvé là. Au départ, il devait intervenir dans le Palais de papes, déjà d’une envergure certaine, à la suite notamment de Sebastião Salgado ou d’Eva Jospin. La manifestation s’inscrit dans le cadre des 25 ans d’Avignon capitale européenne de la Culture et en clin d’œil à « La Beauté », l’importante manifestation qu’y avait alors orchestrée Jean de Loisy en 2000. L’artiste a alors demandé à occuper d’autres sites. Si « le cœur battant reste le Palais des papes », souligne la maire de la cité, Cécile Helle, Jean-Michel Othoniel déploie son travail dans pas moins de dix lieux, avec le soutien de la galerie Perrotin.

Peintures de Jean-Michel Othoniel au Palais des papes. © ENove Josserand - Avignon Tourisme

Au Palais des papes, ce sont 133 pièces qui trouvent place dans 15 salles. Un astrolabe géant est posé dans la cour. Dans la Grande Trésorerie, un Nœud de Lacan, nœud borroméen géant en perles noires, rappelle les liens de l’amour mais aussi, par sa couleur, leur ambiguïté. Dans la grande salle, sont présentées 60 peintures monumentales inspirées par son herbier merveilleux et jamais encore montrées en France…

Dans les jardins coule une fontaine parée de colliers de verre comme si une belle allait en sortir. Pétrarque semble avoir écrit ses vers tout exprès pour l’artiste : « Aucune larme par mes yeux versée/Ne saura jamais me décourager/Nulle part où le soleil va briller/Il n’est de perle à vous pareille ».

Dans une salle de la Collection Lambert, une œuvre en verre d'Othoniel devant une peinture murale de Sol LeWitt. Photo A.C.

Dans les salles de la Collection Lambert, l’artiste se confronte à Sol LeWitt et aux grands minimalistes et conceptuels. La visite permet aussi une piqûre de rappel pour se souvenir que longtemps Jean-Michel Othoniel fut un créateur conceptuel qui sentait le soufre, au sens propre du terme, quand il élaborait des pièces à partir de ce minéral des îles éoliennes, notamment pour la Documenta de Cassel en 1992. Puis s’est opérée la transmutation de l’artiste vers d’autres territoires. « Les dessins noirs sur fond blanc de Sol LeWitt des années 1980 ont été très importants pour la question de la beauté, tout comme ses travaux terre de Sienne… Tout le monde de l’art lui était tombé dessus : pourquoi faire du beau dans le minimalisme ! ? Pour moi, cela a été une prise de conscience de la beauté, que je pouvais resignifier à travers mon travail ». L’exposition de Jean de Loisy en 2000 l’a aussi marqué. « Aujourd’hui, les jeunes générations d’artistes s’en emparent, mais à l’époque, le traiter était impertinent. L’idée qu’une œuvre puisse être belle semblait incompatible avec celle de radicalité », confie-t-il. Tout comme ses voyages en Asie où il a beaucoup exposé son travail, de l’Hara Museum of Contemporary Art à Tokyo, au Japon, au Long Museum de Shanghai, en Chine, région du globe où l’art lui a donné « confiance en la beauté ».

Toujours à la Collection Lambert, il montre ainsi Le Corps de l’Inde, une œuvre en briques de verre inspirée d’une couverture de magazine sur les bûchers en Inde au moment de la pandémie de Covid-19, aux teintes d’ambre brûlée. Ces briques de verre sont justement fabriquées dans le sous-continent, avant de passer par son atelier. « La découverte du verre sur les bords des routes lors d’une résidence en Inde il y a une quinzaine d’années m’a inspiré et m’a aidé à sortir de la solitude de l’atelier », explique l’artiste, désormais entouré d’une vingtaine de personnes dans son studio. La transmutation encore ! Ici, ces briques sont fragiles et non pleines, suspendues sur des structures. Jean-Michel Othoniel veut à sa façon « reconstruire le monde », une démarche que l’on retrouve entre autres au musée Lapidaire empli de marbres funéraires antiques, où il expose un grand mastaba en briques de verre.

Au Petit Palais d'Avignon, Othoniel a placé ses auréoles de verre soufflé parmi les tableaux Renaissance. Photo : A.C.

Au Petit Palais, l’artiste déploie de nouvelles œuvres qu’il envisageait de réaliser depuis longtemps : des nimbes en verre soufflé très fin, comportant des inclusions de mica et d’or, repeints par l’artiste. « Je rêvais depuis 25 ans de faire un projet autour des auréoles des saints, qui sont aussi pour moi un peu comme des éclipses », dit-il. Son intervention est cette fois minimaliste et discrète parmi l’accrochage de la collection Campana, 320 œuvres de la Renaissance italienne provenant du musée du Louvre. Si ce dépôt date de 1976, il a été gravé dans le marbre en 2024 à travers une convention entre l’État et le musée avignonnais, ce dernier étant alors rebaptisé musée du Petit palais - Louvre en Avignon. Dans une salle, une sorte de chandelier de nimbes en verre suggère la Cène ; plus loin, l’artiste a glissé des auréoles devant des tableaux de l’école de Botticelli, à côté d’une sublime Vierge à l’Enfant de la main du maître. Plus loin, Jean-Michel Othoniel est présent jusque sur le fameux Pont d’Avignon…

Se confronter au monumental, à l’espace public, aux lieux patrimoniaux, l’artiste l’avait déjà fait, notamment en 2021-2022 au Petit Palais - Musée des beaux-arts de la Ville de Paris. Cette fois l’échelle change. C’est sans doute dans ce dialogue avec de vastes espaces anciens que l’œuvre de l’artiste se révèle le mieux. « Je n’ai jamais été fasciné par le White Cube que l’on déploie aux quatre coins du monde, qui est reconnu dans le milieu de l’art, mais qui ne m’excite pas. Ce qui m’intéresse au contraire, c’est que l’exposition me nourrisse et m’offre de nouvelles rencontres. Il faut inventer le lieu où l’on va exposer, une leçon apprise de Christian Boltanski », nous confie l’artiste.

Pour parachever la présence de Jean-Michel Othoniel en Avignon, Midnight Souls, une chorégraphie inédite de Carolyn Carlson, sera présentée dans la Cour d’honneur du Palais des papes les 1er et 2 août avec le danseur étoile Hugo Marchand sur des musiques de René Aubry et Philip Glass, au milieu d’œuvres de l’artiste. Un vrai sacre.

--

« Othoniel. Cosmos ou Les Fantômes de l’Amour », jusqu’au 4 janvier 2026, dix lieux, 84000 Avignon.

Livre de l’exposition avec des aquarelles de Jean-Michel Othoniel, texte de Colin Lemoine, Éditions Actes Sud, 96 p. ;

Catalogue d’exposition, Éditions Actes Sud, 352 p., parution automne 2025.

ExpositionsJean-Michel OthonielAvignonArt ContemporainPalais des papesCollection Lambert
Partagez
Abonnez-vous à la Newsletter
Informations
À propos du groupe The Art Newspaper
Contacts
Politique de confidentialité
Publications affiliées
Cookies
Publicité
Suivez-nous
Facebook
Instagram
Twitter
LinkedIn
Ce contenu est soumis à droit d'auteurs et copyrights