Depuis son ouverture en 1997, le musée de la Musique, puis, à partir de 2015, la Philharmonie de Paris multiplient les expositions consacrées aux liens, riches et anciens, qui unissent musique et arts plastiques.
Tour à tour thématique ou monographique, la programmation pluridisciplinaire traverse l’histoire : le Moyen Âge (« Entre ordre et désordre », 2004), l’âge baroque (« Figures de la passion », 2001-2002), la période romantique (« L’Invention du sentiment », 2002), les temps modernes (« Marc Chagall. Le triomphe de la musique », 2015-2016) jusqu’à la création contemporaine (« Replay. Christian Marclay », 2007, ou « Basquiat Soundtracks », 2023, entre autres).
Après la remarquable exposition « Paul Klee. Polyphonies » en 2011-2012, l’institution présente une nouvelle immersion visuelle et sonore dans l’abstraction picturale avec « Kandinski. La musique des couleurs », organisée en partenariat avec le musée national d’Art moderne – Centre Pompidou, à Paris. Figure de proue de Der Blaue Reiter (Le Cavalier bleu), membre du Bauhaus, Vassily Kandinsky poursuit sans relâche ses expérimentations vers une synthèse des arts, nourri entre autres par sa découverte de l’opéra Lohengrin (1850) et autres Gesamtkunstwerke (œuvres d’art totales) de Richard Wagner. Mélomane, collectionneur de disques et de partitions, le célèbre peintre et théoricien de l’abstraction fait de la musique non pas une simple influence ou source d’inspiration, mais bien une matrice de ses créations.
Des compositions méditatives
C’est dans ce sillage que s’inscrit la série de dessins et de peintures de Gabriel Orozco intitulée Partituras (« partitions » en espagnol), précédemment présentée à la Marian Goodman Gallery, à New York (du 12 septembre au 25 octobre 2025), et actuellement à la galerie Chantal Crousel, à Paris. Adepte depuis plusieurs années de l’improvisation musicale au piano, celui qui ne sait ni lire ni écrire la musique fait transposer par un musicien professionnel ses courtes compositions méditatives. Les notes inscrites sur leur portée sont à leur tour converties, d’abord sous la forme de diagrammes puis dans les langages formel et chromatique complets propres à Gabriel Orozco : arcs, cercles, lignes droites et courbes sont tracés dans une palette restreinte aux rouge, bleu, blanc et doré.
Fruits d’une chaîne de transposition et d’interprétation, ces œuvres se fondent sur l’expérience physique première de l’artiste d’une équivalence processuelle entre le mouvement des mains sur le clavier et celui sur la toile ou le papier. Tant et si bien que Gabriel Orozco décide de donner pour titre à ses réalisations plastiques le lieu, la date et l’heure de l’enregistrement de ses morceaux de musique, dont on peut donc voir les métamorphoses accrochées au mur tout en en écoutant les sons originels diffusés dans les salles de l’exposition. Un répit merveilleux dans le brouhaha du monde (et des semaines de foires).
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« Kandinsky. La musique des couleurs », du 15 octobre 2025 au 1er février 2026, Philarmonie de Paris, 221, avenue Jean-Jaurès, 75019 Paris, philharmoniedeparis.fr
« Gabriel Orozco. Partituras », du 20 octobre au 22 novembre 2025,
galerie Chantal Crousel, 10, rue Charlot, 75003 Paris, crousel.com
