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Accrochage renouvelé pour la réouverture de la Sainsbury Wing de la National Gallery de Londres

Après deux années de travaux, la Sainsbury Wing devient l’entrée principale de la National Gallery. Ce chantier a offert l’occasion de restaurer plusieurs chefs-d’œuvre et de repenser la présentation de l’incomparable collection de peintures de la première Renaissance. Le résultat est saisissant.

Alison Cole
23 mai 2025
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Le Martyre de saint Sébastien d’Antonio et Piero del Pollaiuolo, récemment restauré, se trouve à l’extrémité de la grande enfilade centrale de la Sainsbury Wing, évoquant la nef d’une basilique. Au premier plan, le Crucifix de Segna di Bonaventura est suspendu au plafond. Photo The National Gallery

Le Martyre de saint Sébastien d’Antonio et Piero del Pollaiuolo, récemment restauré, se trouve à l’extrémité de la grande enfilade centrale de la Sainsbury Wing, évoquant la nef d’une basilique. Au premier plan, le Crucifix de Segna di Bonaventura est suspendu au plafond. Photo The National Gallery

Nous avons été profondément attristée lorsque la National Gallery a fermé la Sainsbury Wing pour entreprendre, sous la direction de l’architecte Annabelle Selldorf, sa transformation en une « entrée plus accueillante ». Ce lieu a toujours été pour nous une deuxième maison : un sanctuaire où retrouver, en plein cœur de Londres, la beauté apaisante d’une église florentine dessinée par Brunelleschi. C’est exactement l’expérience qu’avaient souhaité offrir les architectes postmodernes Robert Venturi et Denise Scott Brown en 1991, en concevant un écrin idéal pour la collection inégalée de peintures de la première Renaissance. Prolongeant le bâtiment d’origine de William Wilkins, datant des années 1830, au niveau de l’étage principal, la Sainsbury Wing permet un parcours fluide à travers l’histoire de la peinture occidentale, depuis la Crucifixion Mond de Raphaël jusqu’au tableau Whistlejacket de George Stubbs.

La réouverture est-elle à la hauteur de l’attente ? Sans aucun doute. Les chefs-d’œuvre familiers retrouvent leur écrin, comme cette salle baignée de lumière et pensée comme une chapelle pour accueillir les toiles lumineuses de Piero della Francesca. À l’occasion de son bicentenaire, la National Gallery propose un nouvel accrochage d’envergure, réparti sur ses deux ailes, et intitulé « C C Land : the Wonder of Art », du nom de son mécène, un promoteur immobilier basé à Hong Kong. La fermeture prolongée a permis de restaurer plusieurs œuvres majeures, de repenser la muséographie – en jouant habilement avec les perspectives conçues par Venturi et Scott Brown – et de revaloriser certaines pièces grâce à un nouveau cadre éclatant. Le résultat est véritablement saisissant.

Le réaménagement orchestré par Annabelle Selldorf a transformé la Sainsbury Wing en point d’entrée principal du musée. Travaillant dans le respect des contraintes d’un bâtiment classé, elle a ouvert et éclairé le rez-de-chaussée, en perçant deux ouvertures dans le plafond pour créer de spectaculaires volumes en double hauteur. Les anciennes colonnes, trop massives, ont disparu ; les fenêtres, autrefois obscurcies, laissent enfin entrer la lumière. Ayant « grandi dans les musées », comme elle le confie, Annabelle Selldorf souhaite que chacun puisse y ressentir un même sentiment de familiarité. Sa rénovation privilégie ainsi l’« attitude » plutôt que la « forme ». On entre désormais dans le musée par une nouvelle piazetta donnant sur Trafalgar Square. Des grilles transparentes s’ouvrent sur un vaste vestibule pensé pour accueillir et fluidifier le passage des visiteurs, surplombant un auditorium entièrement rénové.

En haut de l’escalier asymétrique d’origine – longeant la paroi vitrée et le restaurant de Giorgio Locatelli à l’étage, agrémenté de la fresque Crivelli’s Garden de Paula Rego –, le visiteur est désormais accueilli par une œuvre contemporaine : Mud Sun de Richard Long. Pour notre part, nous regrettons la disparition de L’Assomption de la Vierge (vers 1475) de Francesco Botticini, qui occupait autrefois cet emplacement. Elle donnait l’impression d’une ascension solennelle, à la manière des marches menant à la basilique Santa Maria in Aracoeli à Rome – ou d’une remontée depuis une crypte obscure –, jusqu’à une première vision des cieux. Heureusement, cette sensation n’a pas été entièrement sacrifiée.

Aucune circulation imposée ne dicte le parcours à travers les 17 salles de la Sainsbury Wing, restées intactes malgré les travaux orchestrés par Annabelle Selldorf. Ce qui frappe d’emblée, c’est la rigueur retrouvée de l’architecture : la pierre pietra serena bleu-gris resplendit, les barrières de protection en bronze patinées protègent discrètement les œuvres. Dans la première salle, le paysage minéral et mystérieux de La Vierge aux rochers de Léonard de Vinci introduit le visiteur dans un espace feutré, quasi troglodytique, qui abrite le grand dessin préparatoire du maître, le Carton de Burlington. De grandes vitrines autoportantes, inspirées des dispositifs spectaculaires du Rijksmuseum d’Amsterdam, accueillent des chefs-d’œuvre comme le Diptyque de Wilton. Elles permettent d’appréhender l’art médiéval et de la première Renaissance autant comme expérience visuelle que comme réalité matérielle : diptyques portables, prédelles détachées, panneaux peints destinés à orner des coffres de mariage.

Mais rien ne prépare à la majestueuse enfilade centrale, qui évoque la nef d’une basilique italienne, succession impressionnante de retables déployés dans une mise en scène aussi solennelle qu’éloquente. C’est là que s’exprime toute la maîtrise des équipes de la National Gallery – conservateurs, restaurateurs, encadreurs, scénographes, éclairagistes, ingénieurs – dans un effort collectif parfaitement abouti. À une extrémité trône, comme auparavant, Le Martyre de saint Sébastien d’Antonio et Piero del Pollaiuolo, récemment restauré pour révéler l’éclat de ses contrastes chromatiques et narratifs. À l’autre, le monumental Retable de San Pier Maggiore de Jacopo di Cione, reconstitué dans toute sa splendeur, occupe un espace dont la largeur correspond presque exactement à celle du couvent bénédictin (aujourd’hui disparu) pour lequel il avait été conçu.

Le retable reconstruit de San Pier Maggiore par Jacopo di Cione est installé sur un socle à l’une des extrémités de la « nef » principale des galeries de la Sainsbury Wing. Devant lui, les panneaux d’autel de Fra Angelico provenant du couvent de San Domenico à Fiesole sont présentés plus bas qu’auparavant, afin de souligner leur fonction de prédelle. Photo The National Gallery

Réencadrées avec une rare finesse par Peter Shade, les deux œuvres reposent sur de sobres socles gris, réservés à travers tout le parcours aux retables majeurs. Devant le retable de Jacopo di Cione, une longue vitrine centrale présente les magnifiques panneaux d’autel de Fra Angelico provenant du couvent de San Domenico à Fiesole, désormais placés plus bas afin de mieux faire ressortir leur fonction originelle de prédelle. Suspendu dans l’espace qui les précède, le Crucifix de Segna di Bonaventura flotte au-dessus du sol – un choix audacieux, qui évoque la manière dont ces crucifix peints étaient traditionnellement accrochés au-dessus de la clôture de chœur dans les églises italiennes du XIVᵉ siècle. Le résultat est une forme de « trinité visuelle », une superposition d’expériences de regard, où les panneaux de Fra Angelico semblent prolonger ou compléter le retable de Cione.

Le long de l’enfilade centrale, c’est plus d’un siècle d’évolution artistique qui se déploie : des anges nimbés d’or de Cione (1370-1371) jusqu’au paysage en perspective des frères Pollaiuolo (vers 1475), en passant par Cima da Conegliano, Carlo Crivelli ou Matteo di Giovanni. Les panneaux de la somptueuse Maestà de Duccio, actuellement exposés au rez-de-chaussée dans l’exposition « Sienne : la naissance de la peinture, 1300-1350 » (jusqu’au 22 juin), sont appelés à regagner prochainement leur place ici.

Les salles latérales, plus intimes et presque carrées, évoquent davantage des intérieurs privés. Le cadre de ces quatre superbes salles se prête idéalement à la présentation de la Renaissance nordique, où figure notamment Le Portrait des époux Arnolfini de Jan van Eyck. Plusieurs chefs-d’œuvre allemands et flamands postérieurs ont été déplacés depuis le bâtiment de Wilkins — notamment L’Adoration des Rois (1564) de Pieter Bruegel, mais aussi des œuvres de Bosch et de Holbein – dans un souci de rééquilibrer une collection historiquement orientée vers la Renaissance italienne (qui représente environ un tiers des 2 400 tableaux du musée). Ce regroupement crée un léger décalage chronologique. Le Portrait de femme (1550) de Catharina van Hemessen, seule œuvre d’une artiste femme présentée dans cet accrochage, est exposé dans son propre espace – et paraît d’autant plus silencieux, presque reléguée.

Les salles thématiques « Or » et « Regards sur la nature » offrent deux lectures distinctes de l’histoire de l’art. Cette dernière réunit quelques paysages miniatures, de véritables merveilles, bien que les visions aristocratiques de Pisanello y paraissent légèrement en décalage. Ses pairs, artistes de cour au service des raffinements princiers de Ferrare, Mantoue ou Urbino, ont pour la plupart été relégués dans la salle 14 du bâtiment Wilkins, notamment les œuvres majeures de Mantegna. Raphaël, largement représenté dans la Sainsbury Wing, se retrouve ainsi séparé des panneaux de Juste de Gand, qu’il côtoyait enfant à la cour d’Urbino. Mais cet accrochage n’a rien de figé, contrairement à celui, plus permanent, des galeries Renaissance du Victoria & Albert Museum. Il est amené à évoluer, et l’on peut espérer que ces œuvres en exil regagneront leur juste place.

La Résurrection de Piero della Francesca a retrouvé sa place dans l’espace clair, semblable à une chapelle, de la Sainsbury Wing, un lieu spécialement conçu pour cette œuvre en 1991. Photo The National Gallery

Les salles consacrées à Venise et à Florence sont parmi les plus réussies, et sont pour la première fois voisines. Le parcours donne l’impression de passer de l’intimité fastueuse d’un palais florentin – où des œuvres comme Mars et Vénus de Sandro Botticelli faisaient littéralement partie de l’environnement domestique – à la fluidité lumineuse d’un palais vénitien s’ouvrant sur le Grand Canal. À Venise, Le Doge Loredan de Giovanni Bellini règne en majesté. À Florence, une vitrine centrale met en lumière les panneaux peints de Francesco Pesellino illustrant L’histoire de David et Goliath, conçus pour un coffre de mariage, et mis en regard avec La Bataille de San Romano de Paolo Uccello, restaurée et réencadrée. L’effet de superposition est saisissant : un cheval cabré répond à un autre.

Pour Annabelle Selldorf, l’âme de son intervention architecturale réside dans une conception profonde de l’« espace public » : une forme de village, ou de petite cité, où les gens peuvent échanger, mais aussi simplement trouver leur place. Les œuvres de la Sainsbury Wing occupent désormais des espaces pensés pour elles – elles y « résident », dialoguent entre elles et avec le visiteur, ou, comme L’épervier de Jacopo de’Barbari, trouvent leur perchoir idéal. Comme le résume avec élégance Per Rumberg, directeur du département de la conservation de la National Gallery, « ce sont les œuvres qui ont donné le ton ; nous ne voulions pas en faire trop. »

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Réouverture de la Sainsbury Wing, National Gallery, Trafalgar Square, Londres

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