Le Grand Palais est-il en passe de récupérer les espaces du palais d’Antin, écrin depuis 1937 du Palais de la découverte, qui a initié à la science des générations d’enfants et de parents en proposant ateliers et expositions, sans oublier son merveilleux planétarium ? La question est sur toutes les lèvres depuis que l’Élysée a débarqué le 12 juin, à l’issue du Conseil des ministres, Bruno Maquart, président d’Universcience, l’établissement public qui chapeaute depuis 2009 la Cité des sciences et de l’industrie et le Palais de la découverte, sur fond de dissensions avec son ministère de tutelle. Ce second mandat est abrégé après l’annulation en juin de plusieurs événements prévus avant une réouverture complète du Palais de la découverte fin 2026.
Interrogé sur une possible mainmise sur les espaces rénovés, Didier Fusillier, président du Grand Palais, répond que la décision appartient au président de la République et au ministère de la Culture. Reste qu’il n’est pas prévu, en l’état, de remettre des cloisons dans un bâtiment dont la splendeur d’antan a été restituée à grands frais – et désormais relié par une galerie aux espaces du Grand Palais – pour y réinstaller des ateliers scientifiques. À la place, un espace dédié à l’intelligence artificielle est notamment évoqué.
La perspective du transfert du Palais de la découverte à la Cité des Sciences, voire de sa disparition pure et simple, a suscité une levée de boucliers dans la communauté scientifique. Dans une tribune publiée par Le Monde le 13 juin, une cinquantaine de représentants d’institutions scientifiques internationales ont appelé à garantir l’avenir du Palais de la découverte dans son lieu historique, situé à deux pas des Champs-Élysées.
« Depuis plus de huit décennies, le Palais de la découverte est une institution phare de la médiation scientifique – non seulement en France, mais aussi à l’international –, un modèle de médiation exigeante, accessible et inspirante, plaident les signataires. Son approche distinctive et reconnue a inspiré des générations de scientifiques, d’enseignants et de citoyens en rendant accessibles des idées complexes, ainsi qu’en éveillant un intérêt durable pour les sciences. Il a été – et reste – un acteur essentiel de notre domaine. La fermeture ou la réduction définitive de cette institution ne représenterait pas seulement une perte pour Paris et pour la France, mais pour l’ensemble de la communauté internationale qui défend l’accès ouvert au savoir et à la culture scientifique. »
Le sort du Palais de la découverte ne semble pas pour autant scellé. Parmi les scénarios envisagés, la réunion des activités d’Universcience sur le site de la Villette semble tenir la corde Rue de Valois. Mais alors que l’éviction de Bruno Maquart laisse augurer d’un déménagement, auquel la ministre de la Culture Rachida Dati a ouvert la porte, Philippe Baptiste, ministre chargé de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, s’est déclaré « favorable » au maintien du musée scientifique dans l’enceinte du Grand Palais.
« C’est un lieu emblématique incroyable. En France, tous les scientifiques y sont extraordinairement attachés, a déclaré ce dernier dans un entretien au Parisien, le 19 juin. […] Je pense que c’est compliqué de tout regrouper au même endroit. D’autant que la Cité des Sciences va devoir être rénovée. Le bâtiment a vieilli, il a des problèmes structurels. Il y a d’énormes enjeux immobiliers et économiques derrière. Or, on ne peut pas imaginer se retrouver à un moment donné dans une situation où l’un ne serait pas disponible et où l’autre serait en rénovation. » « Ceux qui sont passés au Palais de la découverte ont pu disséquer des grenouilles ou faire des expériences d’électrostatique avec des équipements fabuleux. Mais il faut aussi ouvrir davantage le musée à la société avec des questions autour des technologies, qui sont partout, ou du climat », poursuit-il.
La nomination de la prochaine présidence d’Universcience devrait trancher ce dossier très politique et acter « un nouveau chemin » : la poursuite des noces – ou le divorce – de la culture et des sciences au sein de ce fleuron de l’Exposition universelle de 1900.